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Interface n° 132 Septembre 2013
Le début de la Rivista Liturgica et le mouvement liturgique belge
Le premier numéro de la Rivista Liturgica est daté de Mai-Juin 1914. L'Allemagne entre en guerre en août 1914. Le “mouvement liturgique” belge avait été lancé par l'intervention de Dom Lambert Beauduin au Congrès des Œuvres Catholiques de Malines en septembre 1909.
Les signatures des articles du premier numéro de la Rivista Liturgica sont de Dom Emmanuel Caronti (2 fois), Dom Tommaso Bergh, Dom Pio Alfonso et Dom Eugenio Vandeur.
Dom Eugène Vandeur, moine de Maredsous, Docteur en théologie du Collège bénédictin de St-Anselme à Rome en 1909, aurait dû originellement faire la communication sur la liturgie au Congrès des Œuvres Catholiques de Malines en septembre 1909, mais les moines du Mont-César insistèrent pour que ce soit Dom Beauduin, membre de leur communauté et disciple direct de Dom Columba Marmion qui est élu Abbé de Maredsous en septembre 1909. Dom Eugène Vandeur remplace Dom Marmion comme Prieur au Mont-César dès 1910. Ses articles sur la Communion pendant la messe et sur la Communion fréquente constitueront l'apport extérieur le plus important tout au long de la première année d'existence de la Rivista Liturgica (pp. 34, 109, 158, 213, 356). La revue fera aussi la promotion du livre qu'il tirera de ces apports (p. 374). L'apport belge pour cette première année sera également représenté par deux articles de Dom Laurent Janssens, moine de Maredsous et professeur au Collège bénédictin St-Anselme à Rome (pp. 129, 321).
L'article programmatique qui ouvre la première livraison de la Rivista Liturgica (Il Nostro Programma) se réfère d'entrée de jeu au Motu Proprio de Pie X (22 novembre 1903) qui servit d'argument majeur à l'initiative de Dom Lambert Beauduin. Et, dans le premier article de Dom E. Caronti (La Liturgia, Nozioni e Principi (pp. 7-13), il réfute, sans le nommer, des propos du P. Navatel, s.j., parus dans Les Études en novembre 1913 en réaction contre la publication de Dom Maurice Festugière qui n'est pas mentionnée à cet endroit (p. 9, note 1) [L'essai liturgique du P. Maurice Festugière avait paru en 1913 et avait immédiatement fait l'objet d'attaques violentes de la part des Jésuites dont il mettait en question la spiritualité. Dom Lambert Beauduin va calmer le jeu avec sa publication de 1914 sur La Piété de l'Église. Sur tout cet épisode de la première période du mouvement liturgique Belge, voir : R.-Ferdinand Poswick, o.s.b. et Lambert Vos, o.s.b., Autour d'un Centenaire (1909-2009): Les débuts du mouvement liturgique: Beauduin, Marmion, Festugière et ... les autres, dans Questions Liturgiques, 92 (2011), pp. 3-28].
L'article suivant, de Dom Pio Alfonso (Iniziazione liturgica, pp. 24-33), renvoit à une conférence de l'abbé Grégoire publiée dans la Semaine Liturgique de Maredsous (p. 33). La section suivante du premier numéro est intitulée Liturgia Pratica (pp. 43ss). Elle introduit l'article de Dom Eugène Vandeur en remerciant ce “confrère belge, prieur du Mont-César à Louvain” (p.43) et annonce que son travail sera publié tout au long de la première année. Quant à Vandeur, il ne donne pas d'autres références dans son article que celles qui renvoient à son livre La Sainte Messe: notes sur la Liturgie, paru en 1913.
La section qui suit dans la revue est intitulée
Note e Discussioni. Elle comporte un article de Dom E. Caronti
La Liturgia nella vita parrochiale (pp. 43-53). Cet article renvoit, vers la fin, au livre de Dom M. Festugière,
La Liturgie catholique, cité sans date, ni lieu d'édition, ni autre commentaire.
Cet article précède la section
Movimento Liturgico (pp. 53-63) qui propose un
Bolletino del movimento liturgico in Italia en se référant, dès le premier paragraphe (p. 53), à l'influence des actions des confrères bénédictins “en France et en Belgique”. Le livre de Dom Festugière est encore cité (p.54) dans la foulée d'une nouvelle évocation du
Motu Proprio de Pie X.
Mais, plus intéressant pour les relations des auteurs de la Rivista Liturgica avec le mouvement liturgique belge, la section suivante, qui conclut le premier numéro (p.64), et qui s'intitule Riviste. Elle comporte seulement deux titres recensés: Rèvue (sic) liturgique et bénédictine et Les Questions liturgiques. Ces deux recensions sont signée D.G.C. (qui cela pourrait-il être? Aucun nom ne permet ce type d'abréviation dans les auteurs de la première année de la revue).
Voici une traduction de ces deux recensions:
“Rèvue liturgique et bénédictine – Publiée par les Pères bénédictins de Maredsous en Belgique, elle a contribué de façon importante à la diffusion de la liturgie car elle est rédigée par des personnes d'une autorité et d'une compétence indiscutables comme D. Cabrol, D. Janssens, D. Vandeur, D. Festugière, D. Vitry, D. Beaudin (sic), etc… Il leur a été facile de réunir des prêtres et des laïcs en une Semaine liturgique merveilleusement réussie et de grande utilité pratique. Bien que destinée aux laïcs, elle offre un très grand intérêt également pour le clergé. Abonnement annuel en Belgique: 3 lires, et à l'étranger 4 lires. ‒ D.G.C.
Les questions liturgiques – Comme la revue précédente, c'est l'œuvre de nos confrères bénédictins belges du Mont-César à Louvain. Comme elle est réservée au clergé, elle traite de questions qui intéressent plus spécialement les prêtres. Outre des articles de portée générale, on y trouve des traductions et des études excellentes sur les textes liturgiques, sur les psaumes, sur le chant grégorien. Nous attirons l'attention des lecteurs sur l'article de D. Beaudin (sic) Mise au point nécessaire qui est une réponse complète et courtoise à quelques appréciations trop superficielles et précipitées que le P. Navatel avait données sur l'ouvrage de D. Festugière, La Liturgie catholique. - Louvain travaille avec Afflighem, autre abbaye belge, à la publication du périodique La liturgish Tydschrift (sic), elle aussi destinée au clergé de langue flamande. ‒ D. G. C.”
Il n'y a donc pas de recension à proprement parler de l'ouvrage de Dom Festugière. Mais, dans le 3e numéro de la Rivista Liturgica (septembre-octobre 1914), on trouve un résumé, non-signé, de l'intervention de Dom Beauduin, La piété de l'Église, Abbaye du Mont-César et de Maredsous, 1914, sous le titre Ragioni attuali della Liturgia (pp. 142-148). Dom Festugière était cependant cité et utilisé (p. 103) par Dom E. Caronti dans son article La Liturgia – Nozioni e Principi (pp. 88-108) dans le second numéro de la Rivista Liturgica (juillet-août 1914). C'est dans ce second numéro qu'apparaît pour la première fois le nom de Dom Ildefonso Schuster, avec un article sur L'Eucaristia Lucernaris (pp. 73-87).
Quant aux liens avec le mouvement liturgique belge, on en trouve encore d'autres traces tout au long des livraisons de cette première année de la
Rivista Liturgica:
- le livre de Dom Germain Morin, L'idéal monastique et la vie chrétienne des premiers jours, Madresous, 1914², est longuement analysé sous l'angle liturgique dans un article non-signé
L'Eucaristia e la preghiera liturgica – in un recente libro di D. Morin (pp. 180-183);
- la Semaine Liturgique de Maredsous est à nouveau mentionnée (p. 185) ainsi que la
Journée liturgique de Louvain (p. 187);
- enfin, sont encore cités : D. Beauduin, D. Maur Wolter, D Morin (pp. 192, 244, 300, 314).
On peut donc conclure que la présence du mouvement liturgique belge est massivement présente dans les premières livraisons de la Rivista liturgica, mais il semble que ce soit plus sous sa composante maredsolienne (Vandeur, Janssens, Morin, Wolter) que sous sa composante louvaniste.
Il semble également que la revue naissante a joué la prudence par rapport au travail de Dom Festugière, tout en prenant clairement parti en faveur de ses thèses contre les attaques du Jésuite, P. Navatel. Mais, en cela elle s'appuie surtout sur la Mise au point donnée par Dom Lambert Beauduin. Celui qui deviendra le cardinal, puis le Bienheureux Dom Ildephonse Schuster, ne semble pas intervenir dans ce débat.
Fr. R.-Ferdinand Poswick , osb