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Jours Saints 2010:
Conférences du Professeur Camille Focant
Actuel Vice-Recteur pour les Sciences humaines à
l'Université Catholique de Louvain (Louvain-la-Neuve),
Camille Focant avait accepté d'animer trois temps de
partages aux matins des trois jours saints: Jeudi 1,
Vendredi 2 et Samedi 3 avril.
Bien que spécialiste du Nouveau Testament, il a proposé une
lecture du Sacrifice d'Isaac (Genèse 22), puis une lecture
du chapitre 14 de l'évangile de Marc (l'onction de Béthanie
et la prière de Jésus au jardin de Gethsémanie), et, enfin,
deux textes mettant en jeu la rencontre de Jésus avec des
femmes (la Syrophénicienne de Mc 7.24-31 et la
Marie-Madeleine au tombeau de Jn 20.11-18).
Ces analyses pleines de finesse ont permis une
réappropriation de ces textes dans le cadre d'un cheminement
pascal.
Personnellement, j'ai été frappé une fois de plus par la
proximité de contenu entre la prière de Jésus à Gethsémanie
et celle du Notre Père: Abba, Père… l'heure / l'heure est
venue (qui est donc le "présent", le possible réalisé) …tout
est possible (le projet du Père qui dépasse tout) …la coupe
(nourriture ou boisson, l'essentiel à partager) …aux mains
des pécheurs, celui qui me livre (les agresseurs, les
débiteurs) …ne pas entrer en tentation …le fils de l'Homme
livré (délivre-nous du mal).
Mais aussi cette vision que le lieu de la présence réelle de
Dieu n'est plus dans le Saint des Saints dont le voile se
déchire, mais dans le Corps supplicié qui devient un corps
Messianique, christique.
Nouveaux médias:
"Power Point nous rend idiot"
Derrière les remarques critiques de l'éditorial du présent
numéro d'Interface, on pourrait relever un bon nombre
d'informations véhiculées par la presse. En voici l'une ou
l'autre.
Un article du New York Times
dont le Courrier International (n°1021, 27 mai – 2 juin
2010) publie de larges extraits montre l'aberration de la
communication à laquelle on aboutit par une utilisation
inconsidérée de certains outils de travail comme
Power Point. Un bureau entier du
Pentagone passe son temps à mettre sous forme de dessins
sophistiqués sous Power Point, les différentes études et
décisions stratégiques de ce centre militaire de décision.
Un exemple de ces tableaux est donné en illustration: plus
de 120 "titres de chapitres" sont reliés pas des systèmes de
flèches pour expliquer la stratégie des USA en Afghanistan!
"Quand nous aurons compris ce schéma, nous aurons gagné la
guerre" s'est exclamé le responsable des opérations sur le
terrain! Tandis qu'un autre disait: "Power point nous rend
idiot" – "on redoute, commente l'article, que le logiciel
n'empêche toute discussion, réflexion critique et prise de
décision réfléchie"!! "Beaucoup d'officiers estiment que ces
schémas transmettent moins d'informations qu'un document de
cinq pages"!! Qu'on se le dise!
L'UNESCO vient de lancer un Observatoire mondial contre le
piratage: Face aux nouvelles formes que prend le livre, face
aux transformations dans la conception, la production et
dans l'accès à son contenu, il est urgent de rappeler qu'il
ne peut y avoir de développement du livre sans respect du
droit d'auteur" affirme l'actuelle directrice générale de
l'Unesco: "cela est d'autant plus vrai à l'heure où la
numérisation expose encore plus le livre à des risques
d'utilisation illicite".
Le Bulletin de l'OCLC (Next-Space,
No 15, avril 2010), un réseau de catalogues de bibliothèques
qui permet de localiser 180 millions de titres de livres,
périodiques, manuscrits, enregistrements de tous genres
localisés dans 1 milliard 500 million d'objets détenus par
des milliers de bibliothèques autour du monde… est en train
de passer de l'accès à des titres (ce que faisait
originellement un catalogage) à l'accès à des métadonnées
(entendez: tout ce qui peut vous dire quelque chose à propos
du titre en question): par exemple les 'signets' (bookmarks)
donnés par des lecteurs. Plus un livre est noté, plus il
vaut? Les statistiques habituelles qui portaient jusque là
sur le nombre de titre enregistrés, sur le nombre de
bibliothèques nouvelles dans le réseau, sur le volume des
échanges de livres, etc… sont remplacées par des
statistiques ubuesques: le nombre d'informations
complémentaires données par les internautes sur 3.150 photos
numériques mises à leur disposition par la
Library of Congress (20.000
'tags' en 2 jours!!); ou encore l'estimation selon laquelle
chaque citoyen des USA reçoit par jour l'équivalent de 34
Gigabytes (milliards) d'éléments d'information à travers
tous les types de médias (ordinateurs, TV, radio, téléphones
fixes ou portables, imprimés, publicité, etc). Mais,
heureusement, ces statistiques avertissent en final que 90%
des documents communiqués dans le monde n'ont pas
l'environnement de 'métadonnées' (contexte, domaine,
pertinence pour la recherche, niveau ou qualité de
rédaction) nécessaire pour l'utilisateur, ce qui coûte aux
institutions 5.521 $ par an et par travailleur en temps
perdu pour rechercher de l'information!!
Maison des
Écritures, Avril-Juin 2010:
Le Crucifié et l'exposition biblique du P. Passelecq
En plus du parcours permanent qui essaye d'expliquer le
passage de l'écriture alphabétique à l'écriture électronique
tel qu'il a été vécu par l'équipe pionnière de Maredsous par
l'application de l'informatique aux textes de la Bible, des
expositions temporaires sont présentées.
Ces mois-ci on peut voir:
1. Une exposition sur le thème du
Crucifié:
On sait que la crucifixion de Jésus de Nazareth, suivie de
sa résurrection, est au cœur du message des chrétiens. On
montre, en quelques vitrines et quelques posters affichés,
l'évolution des présentations de la crucifixion et du
crucifié.
Les notices dans les vitrines décrivent leur contenu. Mais
on peut voir en outre: une très belle représentation de
Jésus sur la croix dans une Bible catalane récemment
publiée; une représentation de Jésus portant sa croix dans
la tradition iconographique éthiopienne; des représentations
africaines des scènes de la crucifixion et de sa
préfiguration dans l'épisode du serpent élevé au désert par
Moïse; des représentations de la crucifixion créées aux
Indes.
2. La présentation d'une partie des
panneaux de l'exposition biblique réalisée par Dom Georges
(Paul) Passelecq en 1954, panneaux réalisés par Roger
Duterme.
Dom Passelecq a été le traducteur de la Bible de Maredsous,
la première Bible en français contemporain publiée dès 1948
(Nouveau Testament) et 1950 (toute la Bible).
Ces panneaux, peints à l'huile sur toile ont circulé, à
l'époque, en Belgique, en France et en Suisse. Ils
présentent l'essentiel de ce que l'on doit savoir sur la
Bible considérée comme Parole de Dieu qui trouve son
accomplissement dans la personne de Jésus de Nazareth, le
messie (christ) crucifié à Jérusalem vers l'an 30 de notre
ère, auquel se réfère la foi des 2 milliards de Chrétiens
d'aujourd'hui.
La fraîcheur et le caractère publicitaire de tous ces
tableaux reste remarquable pour une catéchèse biblique
contemporaine!
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Éditorial
Facebook, Twitter et autres 'réseaux
sociaux' ... les avatars et illusions de l'opinion!
Quand le Minitel a été lancé en
France (1980ss), on a appris très vite qu'une des
locomotives commerciales (après l'annuaire téléphonique)
étaient les 'messageries roses', ces sites qui permettaient
aux personnes des contacts en vue de rencontres sexuelles et
autres choses du genre! Au grand scandale de certains, je me
suis tout de suite réjouis de la chose et j'y ai vu le signe
positif que ce moyen technologique, froid et propre à
renforcer l'isolation individualiste des gens, était
immédiatement mis au service de la rencontre humaine la plus
sensuelle, la plus charnelle, mais également, en son fond
authentique, la plus haute si elle est vécue comme le
sacrement de l'union du Christ et de son Église déjà
préfigurée dans le couple humain voulu par le Créateur comme
son image et sa ressemblance: un être relationnel.
Rien d'étonnant que la
pornographie reste une des 'niches' rentable de l'Internet!
Rien d'étonnant, dès lors, que tout type de communication
interpersonnelle soit le premier usage de l'Internet pour
quiconque se met à utiliser ce médium. D'autant qu'il se
rapproche et a tendance, actuellement, à se fusionner avec
la téléphonie mobile (le GSM, le téléphone portable). Cette
téléphonie présente, en effet, de plus en plus, un accès
très complet à toutes les fonctions proposées dans
l'Internet et les écrans des téléphones protables sont de
véritables écrans d'ordinateur. L'i-Pad d'Apple va tout
droit dans ce sens en rapprochant également l'e-book (le
livre électronique) d'un usage plus universel!
Il me semble que le téléphone
portable est réellement le vecteur d'écriture/lecture de la
civilisation de l'écriture électronique, comme le papier (ou
autre matière similaire), le stylo, le caractère
d'imprimerie ont été les vecteurs de la civilisation de
l'écriture alphabétique que nous quittons en douce… mais
très vite!!
Mais la communication, aussi
sophistiquée soit-elle, n'est pas la relation.
D'où, toutes les illusions
actuelles dans l'utilisation des moyens de communication!
Avec le risque d'en rester
perpétuellement, comme des écureuils dans le tambour de leur
cage, au niveau de la communication. Ce risque est d'autant
plus grand que la communication multiple amplifie celle-ci
et donne un sentiment d'audience phénoménalement étendue par
rapport aux vraies relations qui supposent l'accès intime à
une ou, au plus, à quelques personnes seulement à la fois!
D'où également une amplification
des malentendus. Ces malentendus que génèrent d'ailleurs la
Presse et les grands médias de diffusion (radio, TV) depuis
qu'ils existent! Le philosophe Kierkegaard avait déjà
prophétisé cette distorsion de la communication humaine en
se demandant même s'il n'était pas le signe avant-coureur de
la fin de la civilisation occidentale (voir: R.- F. Poswick,
Dictature de l'audience: Kierkegaard l'avait bien dit, dans
Médias-Pouvoirs, 3 juin 1986, pp. 71-76). Il écrivait,
notamment, en 1848: "Mettons qu'on invente un instrument, un
porte-voix pratique par sa petitesse et cependant assez
puissant pour être entendu dans tout le pays: est-ce que la
police ne l'interdirait pas , de peur que la société ne fût
jusqu'à la folie si l'on s'en servait?" (Papirer, IX, A
378).
Eh bien!, cher Kierkegaard,
l'instrument a été inventé. Il est "pratique par sa
petitesse" comme un micro-ordinateur ou un téléphone
portable… "et cependant assez puissant pour être entendu"
sur toute la planète!
Sommes-nous en train de devenir
fous? Et quelle régulation pourra-t-elle nous sauver de ce
risque non seulement d'affolement, mais de pure folie? Quand
on voit des responsables politiques qui "twitent" ou qui
sont pendus à leur téléphone portable au cours-même d'une
prestation publique dans le cadre de leurs responsabilités,
on ne peut pas croire à la santé de leur mental ni à la
validité des actes qu'ils posent!
Une "écologie" de l'usage des
médias électroniques va devoir se développer dans les années
qui viennent puisque la rapidité des développements n'a pas
permis de mettre en place une pédagogie préventive. Dans
cette "écologie", le respect de la personne à tous les
niveaux, et pas seulement de la personne des 'autres', doit
avoir la priorité absolue. Est-ce que je respecte l'autre
quand je l'inonde d'informations? Quelle est l'information
qui le/la fera grandir comme personne?
La vérité vous rendra libre, non
l'information, ni la communication!
Fr. R.-F. Poswick, osb
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