Interface n° 116 Septembre 2009
● Éditorial : Nuisances automatisées
● De l'écriture alphabétique à l'écriture électronique
● Une localisation mouvante: la société des 'portables' électroniques
● Exposition: Les Lettres de Saint Paul illustrées: le bilan
● Mille yottas de mille sabords! Calculer les volumes de données électroniques qui s'accumulent partout sur la planète
Comptes rendus:
● Bible et religion
● ● Henri-Dominique Saffrey, o.p., Histoire de l'apôtre Paul, ou,
Faire chrétien le monde
● ● Chantal Reynier, Saint Paul sur les routes du monde romain:
Infrastructures, logistique, itinéraire
● ● Église et Communauté, Maison de la Bible, 51-52, Juin-septembre
2009
● ● Éric Denimal, Les plus belles Paroles de la Bible
● ● Bible et Musique: De Schütz à Bach, 1600-1750
● Media
● ● Guy Rainotte, Dieu, Ado-naï, Allah et moi, DVD
● ● Dominique Yanogo, L'ère de la communication au Burkina Faso. La
pastorale interpellée
News
L'évangile de Luc en langue des signes
française
Le Dictionnaire Encyclopédique de la Bible en ligne: 15
septembre 2009!
Google books: encore! |
Éditorial Nuisances automatisées Des nuisances automatisées, il y en a à peu près pour tous les sens: l'ouïe (excès des oreillettes, téléphones portables), la vue (écrans, flashy, pubs), l'odorat, le goût (cuisine moléculaire, micro-ondes), le toucher (gants pour jeux électroniques), etc. Les héraults de la robotisation s'en réjouissent et proclament que l'être humain s'adaptera à ces nuisances exactement comme il s'est adapté, en moins d'un siècle, aux diverses nuisances générées par la civilisation de l'automobilité: odeur du pétrole et de ses dérivés, bruit des moteurs, fièvre des déplacements et de la vitesse, épuisement des énergies fossiles avec les luttes fratricides qui en sont la conséquence, bétonnage de millions de kilomètres d'espaces pour les routes au détriment de biotopes, migrations vacancières, réduction de la diversité culturelle au plus petit commun dénominateur (bien représenté par la culture des magasins d'aéroports et de stations-service, des magazines et des jeux télévisés), etc. Si on peut discuter de la validité et de la qualité d'intégration des différentes conséquences de l'adoption généralisée de l'automobilité extensive par notre humanité, on ne peut pas nier l'importance quasiment irréversible qu'elle a acquise en un petit siècle. En sera-t-il de même pour l'adoption des dérivés de l'écriture électronique? Dans la mesure où ces dérivés touchent directement l'usage que nous faisons de nos différents 'sens', il faut prévoir, plus que dans le cas de l'automobilité, une évolution rapide et étendue de cet usage sous une forme organique, et, donc, une évolution de la configuration de ces organes tant de façon individuelle que dans leur fonction sociale. Pour la vue, il y a déjà longtemps que je fais le petit test, lors de conférences sur l'automatisation informatisée et la structure de l'humain, de demander à ceux qui, dans l'assemblée, portent des lunettes, de les ôter un instant et de leur demander si, avec leurs lunettes, ils sont plus intelligents ou moins intelligents que sans. Le résultat est indiscutable: sans cette prothèse mécanique (analogique) beaucoup ne se seraient pas trouvés là pour participer à une conférence! Le prolongement d'un de nos organes par une prothèse spécifique et bien adaptée, constitue ce que nous pouvons considérer comme un progrès en humanité. Avec l'électronique, ce prolongement de l'organe peut substituer une vision totalement artificielle à notre vision naturelle ou biologique en transmettant à un cerveau (qu'il faudra bien sûr éduquer en ce sens) des signaux créés par une caméra électronique – exactement comme nous sont transmises aujourd'hui les images qui nous viennent de Mars et que nous transformons, par programmation, en images biologiquement visible sur un écran d'ordinateur. Il suffit de transposer cet exemple aux différents 'sens' pour se rendre compte que la vision, l'ouïe, le goût, l'odorat, le toucher pourraient être affectés par le même type de robotisation. À celle-ci, il faut ajouter tous les effets complémentaires possibles d'une connexion planétaire en télécommunication électronique. La marche vers le 'cyborg' (nom donné à cette hybridation d'humanité par tous les possibles additionnés du développement électronique) semble bien engagée à voir comment toute une génération de 'jeunes' ne peut plus vivre sans son écouteur à l'oreille (qu'il soit lié à un lecteur MP3 ou à un téléphone portable n'y change rien). Perte ou gain en humanité? Comme en toute progression depuis l'homme de Neandertal, il y aura des pertes par atrophie ou destruction d'un organe faute d'utilisation ou par modification de fonction (cfr l'appendice ou le coccyx). Mais je suis personnellement optimiste sur cette nouvelle humanité de la 'noosphère' prophétisée par Teilhard de Chardin. L'inconvénient est que, malgré la rapidité actuelle des mutations, la structure temporelle de développement d'une vie humaine conserve son rythme relativement lent (et court). En conséquence, on ne peut ressentir les évolutions, selon l'âge qu'on a, que comme des nuisances dues aux progrès de l'automatisation informatisée. C'est un phénomène que bien des époques avant la nôtre ont connu. Il faut donc accepter ce décalage, et tenter, autant que possible, de ne pas mourir analphabète de la nouvelle culture. On peut même tenter d'orienter certains choix; mais la marge d'action est, en fait, très réduite en ce domaine car ce sont d'énormes pressions sociales qui déterminent l'évolution et l'adoption, parfois imprévisible, de standards de telle ou telle technologie qui ne sont pas toujours les meilleurs ni les plus rationnels. Mais on finira par mourir heureux de savoir que notre humanité peut encore progresser et se transformer pour être un jour vraiment à la hauteur de ses responsabilités originelles par rapport à notre planète et à toute la création… sans parler du Créateur lui-même! Fr. R.-F. Poswick, osb |